Déconfinement progressif : l’ultime pari de Macron est un affligeant cache-misère

Le Président de la République dévoile, dans la presse quotidienne régionale datée du 30 avril, sa décision, prise en bon épidémiologiste – si l’on croit en les flagorneries du ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer – de lever progressivement les restrictions de circulation des personnes, d’ouverture des commerces et de pratique des activités culturelles et sportives.

Quatre étapes et un enterrement

Le chef de l’État, qui a le chic de se réserver les bonnes nouvelles et de laisser à ses subordonnés le soin d’annoncer les mauvaises, table sur quatre dates et autant d’étapes, sur les mois de mai et juin, pour déverrouiller ce que ni lui, ni son gouvernement n’ont jamais qualifié de confinement en 2021.

Ce faisant, Emmanuel Macron souhaite se muer en chef d’orchestre de la reprise de la vie sociale des Français, laissant derrière nous la séquence Covid comme un mauvais souvenir enfoui sous l’avalanche de moments de bonheur qui nous attendraient dans ces nouveaux “jours heureux” promis par le locataire de l’Élysée.

Macron joue son va-tout

Car il s’agit bien d’une ultime promesse, formulée par Monsieur Macron qui joue ainsi son va-tout en vue de l’élection présidentielle, dont le premier tour se tiendra désormais dans moins d’un an. Son ambition est claire : faire gagner son camp, celui du néolibéralisme aux accents autoritaires de plus en plus prononcés, et le voir gouverner cinq années de plus.

Régressif sur les droits sociaux et la solidarité nationale, répressif contre celles et ceux qui oseraient encore manifester et contester, ultra-flexible avec les grandes fortunes toujours davantage exonérées de contributions et impunies même en cas d’illégalité avérée : le bilan du quinquennat Macron n’est franchement pas fameux pour les premiers de corvée, qui attendent de la bourgeoisie davantage que des applaudissements amusés sur les balcons des façades dorées.

Alors, devant les terribles résultats de ce que tant d’éditorialistes libéraux se plaisaient d’appeler – à une époque qui apparaît bien révolue – le “nouveau monde” macroniste, le chef de l’État est contraint de faire tapis sur sa gestion de la crise sanitaire, malgré le caractère catastrophique de la logistique nationale sur les masques, les tests et désormais les vaccins.

Les paroles et les faits

Cette grande promesse du président de la République d’une liberté retrouvée dissimule mal les faits, âprement vécus sur le terrain et statistiquement confirmés : la situation sanitaire n’est pas bonne.

Nous assistons à une triple stabilisation : le nombre de nouvelles contaminations quotidiennes recensées au SARS-CoV-2 et à ses variants s’est fixé depuis plusieurs semaines à plus de 30.000 ; plus de 300 personnes meurent chaque jour du fait du Covid-19 ; et depuis une semaine, le nombre de patients en réanimation (soins intensifs à l’hôpital) en raison de cette maladie flirte avec les 6.000 pour la première fois depuis un an, largement au-dessus du pic du second confinement à 4.903 lits occupés en réa le 16 novembre 2020.

Face à cela, le déploiement de la vaccination en France se fait à vitesse d’escargot. Officiellement, 6.320.274 personnes ont été vaccinées (deux doses, ou une seule si elle suffit) contre le Covid, avec le 28 avril une légère accélération du rythme établi à 196.269 injections en 24 heures. A cette cadence, sur une population nationale de 67 millions, il faudrait encore plus de dix mois pour que chacun puisse être vacciné.

Les conditions du pourrissement

Or, le déploiement de la vaccination est inversement proportionnel, dans tous les pays développés du monde, à la fureur des antivax – lesquels se retrouvent bien dépourvus d’arguments une fois la population massivement vaccinée sans qu’aucun effet néfaste en termes de santé publique ne puisse être mesuré.

Au contraire, la balance bénéfices / risques penche largement en faveur des nations (le Royaume-Uni ou Israël, par exemple) ayant eu – ou s’étant donné – les moyens de vacciner à grande échelle, loin, très loin des scènes de chaos vécues au Brésil, où l’on a ouvert des fosses communes, ou en Inde, où le pays suffoque littéralement par le manque d’oxygène et la fumée des bûchers se multipliant dans les artères des grandes villes.

Duettiste et financiers

Les faits sont là : Monsieur Macron et son gouvernement se refusent à planifier la production massive de vaccins en France, enfermant la cinquième puissance économique mondiale dans une dépendance totale vis-à-vis des pays producteurs, tout comme ils font bloc, avec Les Républicains et le Rassemblement National – le vote du mercredi 28 avril 2021 au Parlement européen l’ayant démontré – contre la levée internationale des brevets privés sur les vaccins découverts, tirant une balle dans le pied de la recherche publique française.

Ce faisant, nous pouvons légitimement nous demander à quoi joue le chef de l’État ; probablement à un numéro d’équilibriste, dont il a le secret, pour faire monter la popularité de sa duettiste préférée Madame Le Pen, médico-sceptique par excellence, et surtout – surtout ! – pour préserver les intérêts économiques, financiers, commerciaux des grandes firmes qui l’ont placé précisément là où il se trouve, à l’Élysée. Emmanuel Macron n’oublie pas d’où il vient et n’est pas prêt de mordre la main qui l’a nourri hier et le nourrira demain.

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