Secret

Il y a moins d’un an, en juin 2018, le Parlement français a adopté définitivement la loi transposant dans le droit national la directive européenne sur le « secret des affaires ». Cette dernière avait été votée par toute la droite du Parlement européen, députés du Rassemblement National compris, et c’est à nouveau toute la droite, RN inclus, qui l’a fait entrer dans la législation française.

Le secret des affaires avait déjà cours, mais il est désormais inscrit dans le marbre. Les journalistes enquêtant sur les pratiques illicites ou injustes des puissantes multinationales sont priés d’aller voir ailleurs. Le règne de l’argent et de ceux qui le détiennent en masses, prêts à tout pour le conserver ou en agrandir encore le volume, se renforce. Le secret est le prix à payer, disent les serviteurs du pouvoir capitaliste, pour « protéger » les entreprises tricolores, engagées dans la compétition économique internationale, quitte à empêcher toute transparence et toute investigation.

« J’assume parfaitement de mentir pour protéger le Président », affirmait Sibeth Ndiaye, alors conseillère presse de l’Elysée, à l’Express en juillet 2017. Son zèle a été récemment récompensé par sa nomination au poste de porte-parole du gouvernement. Le secret d’État, qui classifie les dossiers sensibles pour en dissimuler les enjeux et les faits aux citoyens, notamment dans le domaine militaire, s’est ainsi élargi aux cercles du pouvoir politique. M. Macron peut décider de tout, du moins dans le périmètre de ce que les ultra-riches jugent acceptable, il n’est pas tenu de rendre des comptes au peuple.

Les simples citoyens et employés, en revanche, n’ont plus aucun secret pour les « géants » du numérique et les États les plus riches. La collecte de données personnelles est soigneusement effectuée par les grandes firmes, en premier lieu les GAFAM – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft, cinq entreprises privées étasuniennes. Votre smartphone, allumé ou en veille, enregistre en permanence les discussions ambiantes avec vos amis et vos proches, puis envoie ces enregistrements sonores aux propriétaires des applications installées. Le plus souvent, sans que l’utilisateur en ait conscience. Vous pouvez faire le test : parlez d’un produit qui vous intéresse à proximité de votre téléphone, et les publicités à son sujet apparaîtront dans votre fil d’actualité sur les réseaux sociaux ou sur Google.

État de santé, projets familiaux, difficultés personnelles… Les multinationales et parfois les services de renseignement, NSA en tête, savent tout de votre vie. Ce n’est être ni paranoïaque, ni complotiste que de constater et dénoncer cette surveillance généralisée, « préventive », préalable à tout écart. La seule technique permettant d’y parer aujourd’hui est la sécurisation des communications, via une messagerie cryptée ou un serveur DNS. Pendant ce temps, les classes populaires sont maintenues dans l’ignorance de ce qui se trame dans les coulisses du pouvoir, économique et politique. Le monde marche sur la tête.

L’intimité de chacun mérite d’être préservée. Le secret entourant le monde des affaires mérite d’être brisé.

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