Reconfinement : faillite, autoritarisme et opportunités

Il se profile, selon la plupart des informations que l’Élysée a volontairement fuitées, un reconfinement national, avec néanmoins un maintien de l’ouverture des écoles, voire des collèges et lycées, ainsi qu’un maintien de l’activité économique autant que possible en présentiel, sinon en télétravail. Cela confirme ce que nous avions pressenti lundi.

La courbe des nouvelles contaminations est exponentielle et, avec deux semaines ou un mois de différé, les courbes d’admissions en réanimation et de décès suivent la même tendance. La vague de froid fin septembre est, entre autres, responsable du chiffre de 523 décès sur les dernières 24 heures au mardi 27 octobre. Les 52.000 contaminations du dimanche 25 octobre peuvent donc nous faire craindre le pire.

Le reconfinement s’impose du fait de la pénurie de moyens de l’hôpital public : plus de la moitié des lits des services de réanimation sont occupés par des patients Covid ce mercredi, sur un total de 5.800 – qui n’a pas augmenté depuis le début de la crise sanitaire ! Le gouvernement a commis la faute de démanteler l’hôpital public, il se rend coupable du crime de poursuivre la paupérisation de notre système de santé.

Jusqu’à présent, les valets politiques et médiatiques de la classe capitaliste répètent en boucle que les lieux de travail, les écoles et les transports ne sont pas des endroits où l’épidémie se développe, niant l’évidence. Les images de transports bondés, notamment en région parisienne, et la multiplication des foyers épidémiques – ou clusters – dans les établissements scolaires, les universités et les entreprises, démontrent si besoin était que certains dirigeants ont pour rôle principal de mentir avec aplomb pour maintenir le profit contre la vie humaine.

Il est évident qu’un nouveau coup d’arrêt à l’économie serait catastrophique. Des millions de travailleurs plongeant au chômage, des milliards d’euros de pertes en valeur ajoutée et en cotisations sociales, des milliers d’entreprises sous le coup d’une liquidation judiciaire forment autant d’éléments qui ébranleraient le pays comme jamais dans l’Histoire contemporaine.

Pour autant, un confinement strict sur tout le territoire national mais dans lequel on devrait sortir pour travailler serait une double peine. Nous n’avons pas le recul sur la détresse psychologique provoquée par le premier confinement et l’actualité anxiogène. Elle concerne au minimum des millions de Français, en particulier chez les plus jeunes. Se voir obligé de travailler en présentiel, en prenant donc des risques pour sa propre santé, tout en étant privé de tout ce qui fait lien et tout ce qui fait sens dans la vie humaine, provoquerait des ravages.

La dérive autoritaire du pouvoir en place, qui a commencé bien avant la pandémie avec la répression effroyable subie par les Gilets Jaunes en particulier et les militants en général, se manifeste d’autant plus aujourd’hui que le confinement offre l’opportunité au gouvernement de pousser ses pions en la matière. La police a pour ordre de contrôler et verbaliser à tour de bras, notamment les personnes des couches populaires – faible avec les puissants, dur avec les faibles – pour qui une amende de 135 euros n’a pas le même impact qu’elle n’en aurait sur un individu fortuné.

Chacun espère que le pic épidémique sera atteint le plus tôt possible, sera le plus bas possible, pour que nous tournions enfin la page de cette séquence infernale. Pourtant, si le confinement est acté pour quatre semaines à compter de jeudi soir, rien ne garantit que Noël serait « sauvé » tant d’un point de vue commercial que d’un point de vue relationnel et affectif. Au printemps dernier, le pic épidémique en termes de décès se situait entre le 2 et le 15 avril inclus, seule séquence durant laquelle nous avons connu (certains jours, pas durant toute cette quinzaine) plus de 1.000 décès quotidiens, soit entre deux semaines et un mois après le début du confinement. Les formes graves de Covid peuvent durer plusieurs semaines après la contamination.

Beaucoup d’inconnues demeurent sur cette maladie. Comme nous l’avons vu, l’action politique de Macron, Castex, Véran relève pratiquement de la criminalité quand le nombre de lits en réanimation n’a pas augmenté depuis la première vague, quand les renforts n’ont pas été apportés dans les effectifs de soignants épuisés, quand des nouvelles économies – derrière le paravent des crédits exceptionnels Covid – sont exigées de l’hôpital public, quand le financement du système de santé est mis à mal par le biais d’une baisse volontaire des cotisations sociales.

Autre événement malveillant, l’ignoble « course au vaccin » à laquelle se livrent les laboratoires pharmaceutiques, préférant la concurrence à la coopération. Chaque laboratoire travaille sur son vaccin, ses tests cliniques, et ne verse pas à la communauté scientifique ses résultats pour ne pas se faire « voler » la victoire espérée dans cette compétition. Alors que la découverte d’un vaccin efficace et non-dangereux s’avère aujourd’hui indispensable pour que l’humanité puisse voir la fin de la pandémie, se dessine clairement la faillite d’un marché reposant sur l’égoïsme des acteurs économiques, la confiscation de la connaissance, la course aux publications et aux brevets.

Si nous voulons sortir par le haut de cette (bien trop) longue séquence, il nous faut saisir dans cette épreuve l’opportunité de remettre en question les principes qui régissent notre société et de se battre pour transformer le monde. Pour cela, il est impératif de dépasser l’individualisme qui nous tente tous, et de joindre à la manifestation de la solidarité théorique avec les soignants par un applaudissement général, une véritable solidarité pratique, une unité de classe face aux coups bas de notre gouvernement et de la classe capitaliste, pour que l’un et l’autre répondent enfin de leurs méfaits et que justice advienne le temps voulu.

Benoit Delrue, le 28 octobre 2020

Une réflexion sur “Reconfinement : faillite, autoritarisme et opportunités

  • 29 octobre 2020 à 15h34
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    C’est exactement cela. Que les valeurs de la République soient réellement vécues. Nous avons à choisir notre présent, donc notre futur et à nous engager pour en ce que nous croyons juste de faire.

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