Après les lits, l’autre chiffre choc de la saignée de l’Hôpital public en France

69.000 suppressions de lits en quinze ans, passage de 731 lits pour 100.000 habitants en 1980 à, quarante ans plus tard, 378 lits pour 100.000 habitants soit une division par deux… Le nombre de lits dans les hôpitaux publics français et en particulier dans les services de réanimation, qui arrivent à saturation en ce mois de novembre 2020, est au cœur d’une polémique en raison d’une chute drastique de la capacité d’accueil hospitalière.

Mais un autre chiffre, témoin de la saignée connue par l’Hôpital public français, interpelle – même s’il est moins médiatisé. C’est celui des suppressions nettes de postes dans ce secteur depuis 2008.

La fédération CGT des Organismes sociaux avance sur son site internet, en pied de page, le chiffre de 100.000 postes supprimés dans les hôpitaux en 8 ans.

Si l’on recoupe les sources, on s’approche effectivement de cette masse inédite de suppressions d’emplois.

Concernant uniquement l’hôpital public, 1.800 postes ont été supprimés en 2008, 9.800 supprimés en 2009, 20.000 en 2013 et 15.000 de plus en 2014, ce qui n’a toujours pas suffi aux yeux du gouvernement : entre 2015 et 2017, un plan d’économies de 3 milliards a supprimé 22.000 postes supplémentaires, tandis qu’en 2018, 15.000 suppressions de postes dans les hôpitaux se sont ajoutés.

Chiffres de la Fédération CGT des Organismes sociaux

Chacun peut prendre la calculatrice pour cette macabre addition : entre 2008 et 2018 inclus, ce sont donc 83.600 postes qui ont été supprimés dans le seul secteur public hospitalier. Derrière ces chiffres froids et bruts, il s’agit ni plus ni moins d’une saignée qui explique le mouvement de grève inédit lancé en 2019 auquel une cascade de services hospitaliers se sont joints, ainsi que l’impréparation terrible devant l’épidémie de Covid-19.

Bien sûr, on ne licencie pas à l’hôpital, notait l’Humanité en 2013. La pyramide des âges aidant, les départs en retraite vont se multiplier les cinq prochaines années, offrant une réduction « en douceur » des effectifs.Une “douceur” très amère vu la charge de travail, administratif et médical, qui a pesé de plus en plus sur les épaules de chaque agent, chaque soignant de l’hôpital français.

Notons que cette politique de mise en concurrence et de paupérisation du système de santé français a été préconisée, enrobée de jolis mots, dès 2007-2008 par la Commission Attali, dont faisait partie un certain… Emmanuel Macron. Lequel a poursuivi, au gouvernement puis à l’Élysée, ces mesures mortifères.

Malgré ces suppressions massives d’emplois, le salaire des personnels hospitaliers, du médecin à l’auxiliaire en passant par l’aide-soignant et l’infirmier, n’a pas été revalorisé, laissant la France dans les méandres basses du classement de l’OCDE. Après tout, il y a une logique : supprimer des emplois et dégoûter une profession entière de leur travail et leur traitement, donnant lieu à une colère sur le point d’exploser.

Benoit Delrue, le 20 novembre 2020

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