Agression en Isère : Autiste et apolitique, « il n’a jamais parlé de LFI »
Agressé alors qu’il collait des affiches pour Olivier Véran, Bernard Dupré est apparu légèrement blessé jeudi 4 juillet dans tous les médias nationaux. Selon lui, l’auteur du coup de poing lui a dit être proche de la France insoumise (LFI). Une version vivement contestée par l’avocate de ce dernier.
Une autre version qu’à la télé
Hier jeudi matin, Bernard Dupré, adjoint au maire de La Tronche, en Isère, engagé dans la campagne législative pour le camp macroniste, a été agressé alors qu’il collait les affiches électorales de l’ancien ministre Olivier Véran dans sa commune. Il a immédiatement porté plainte en précisant, à l’ensemble des médias nationaux qui l’ont interrogé, que l’homme qui l’a attaqué serait proche de la France insoumise.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, le principal journal isérois Le Dauphiné Libéré relayait une version très différente de celle reprise en chœur par les chaînes d’information en continu. Dans cette circonscription où a lieu une triangulaire entre Renaissance, Rassemblement National et Nouveau Front Populaire, l’homme de 26 ans qui a eu une altercation avec M. Dupré serait atteint de troubles autistiques, totalement apolitique, n’aurait pas parlé de LFI et aurait lui-même été agressé, selon son avocate, Me Morgane Basset.
« Mon client ne s’est pas rendu à la police, il est allé au commissariat pour porter plainte à son tour » confie Me Basset à la rédaction du Dauphiné Libéré. « Mon client, suivi pour troubles autistiques, s’estime lui aussi victime. Il a affirmé qu’il avait voulu faire une mauvaise blague à l’élu, en voyant le coffre ouvert et les flyers dépasser qu’il a voulu dérober. Son autisme est attesté, il est suivi pour cela. »
Témoignages contradictoires
De fait, la caractérisation politique de cette agression tient aux déclarations de Bernard Dupré, formulées devant les fonctionnaires de police comme devant les caméras. « J’étais en train de nettoyer les affiches d’Olivier Véran qui sont sans arrêt dégradées. Un homme est venu me voler les affiches qui étaient dans mon coffre ouvert. Je lui ai demandé de me les rendre. Il a refusé. Et il m’a foutu un coup de poing. Je lui ai crié : vous êtes LFI ? Il m’a répondu “oui”. Je ne sais pas si c’est un militant ou un sympathisant. Mais il m’a répondu oui. »
Me Morgane Basset réfute fermement ces accusations, tout en donnant un déroulé des faits nettement différent. « Mon client dit que l’élu aurait réagi très vivement au vol des affiches, en brandissant la brosse de collage et en l’attrapant par les cheveux. Une touffe de cheveux a d’ailleurs été versée au dossier. Il dit aussi qu’il a donné un coup de poing pour se défendre, et qu’il n’est pas sympathisant LFI, qu’il n’a jamais parlé de LFI. Il dit que son geste était apolitique. Une mauvaise blague qui a dégénéré. On est loin donc de la première version donnée. »
Et l’avocate au barreau de Grenoble d’ajouter : « Mon client entend porter plainte pour violences mais aussi diffamation. » L’homme de 26 ans doit connaître une expertise médicale vendredi matin, au commissariat où il est maintenu en garde à vue au sein du Service local de Police Judiciaire (SLPJ).
Le mal est fait
Dans un contexte de tension généralisée par la probable arrivée au pouvoir gouvernemental de l’extrême-droite, et par l’incertitude forte qui pèse sur la composition future de l’Assemblée nationale, tous les coups sont pour ainsi dire permis. Y compris les instrumentalisations politiques les plus viles. Nous avons ainsi vu, il y a deux semaines, le ministre de la Justice du gouvernement macroniste, Eric Dupond-Moretti, s’en prendre brutalement à Jean-Luc Mélenchon et au Nouveau Front Populaire en réaction au viol d’une enfant juive par un groupe d’adolescents de son âge, à Courbevoie.
De quoi semer le trouble chez des électeurs appelés par l’actuel Premier ministre Gabriel Attal, au soir du premier tour, à « faire barrage » au Rassemblement National par tous les moyens, y compris en votant pour les candidats du NFP… Après que son propre gouvernement n’ait eu de cesse de mettre un signe égal entre la gauche et l’extrême-droite.
Reste que le mal est fait, et qu’à la violence politique entre militants qui connaît un regain certain après une relative accalmie de vingt ans, s’ajoutent des accusations calomnieuses dont les citoyennes et les citoyens se passeraient bien. En l’espèce, l’enquête ouverte par le procureur de la République de Grenoble, Eric Vaillant, pour « vol avec violences » ne donnera ses conclusions que bien après le second tour des élections législatives, qui se tient dans moins de 48 heures.