Exploit

La ministre des Armées Florence Parly (photo) a qualifié l’opération au Burkina-Faso de sauvetage de quatre otages, dont deux Français, d’« exploit ». S’il faut souligner leur libération et leur prochain retour sains et saufs, il faut souligner tout autant le décès de deux soldats du commando des Forces spéciales durant l’intervention.

Quand bien même Mme Parly justifierait l’emploi de ce mot pour rendre hommage aux militaires engagés et élever au rang de héros ceux qui sont tombés, il s’agit bien davantage d’un coup de communication au mieux maladroit, au pire d’un profond cynisme. L’exploit aurait été de neutraliser les quatre terroristes sans pertes. Quand la ministre parle d’exploit, c’est bien pour nourrir l’auto-satisfaction de l’état-major, qui pilote les opérations depuis son quartier général où les hommes et les femmes sur le terrain ne valent pas mieux que des pions. Pour les soldats de l’armée française, l’unique moyen de se faire respecter par les hauts-gradés est le sacrifice.

Si l’émotion gagne forcément les proches et les citoyens empathiques, elle ne peut occulter le nécessaire travail d’analyse des causes premières des guerres. Trop d’enfants des classes populaires de France, enrôlés dans les zones de conflits, reviennent au pays entre quatre planches. Trop d’hommes, femmes et enfants des populations civiles des pays où l’armée française intervient, souffrent et meurent des guerres que notre État tend à provoquer, aggraver.

Ce qui est en cause, c’est l’impérialisme, et pour être tout à fait précis, l’impérialisme français. Celui qui autrefois colonisait l’Afrique et , et qui aujourd’hui garde le contrôle de l’économie, vampirise les ressources, entretient la grande misère, élimine ceux qui se dressent contre lui. Comment ne pas voir le lien entre l’intervention occidentale en Libye, menée tambours battants par la France au début de la décennie, et la prolifération des groupes terroristes en Afrique subsaharienne ? Comment ne pas voir l’intérêt, pour les multinationales des secteurs du BTP, de l’énergie, des technologies de pointe, de s’accaparer les marchés et les ressources locaux, avançant ses pions économiques chaque fois que nos armées avancent leurs pions militaires ?

Chacun peut comprendre ce que ce genre d’ « exploit » signifie pour Mme Parly et le Président Macron. Anatole France, au lendemain de la Grande Guerre, résumait ainsi ce magistral massacre : « On croit mourir pour la Patrie, on meurt pour des industriels ».

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