Olivier Véran a donné son feu vert pour obliger des soignants porteurs du virus à travailler en présentiel

Au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Nantes, la colère gronde. Des soignants testés positifs au Covid-19 se sont vus obliger de travailler, faute de remplaçants. C’est le syndicat majoritaire CGT qui a tiré la sonnette d’alarme en premier.

Une mise en danger de la vie d’autrui

Alors que toute personne se doit d’être placée en quarantaine pour une durée d’au moins sept jours si elle est testée positive au Covid-19, les soignants des services d’urgences porteurs du virus se sont trouvés en première ligne devant des patients souvent hospitalisés pour d’autres problèmes de santé.

« Cela constitue une mise en danger de la vie d’autrui, dénonce Olivier Terrien, délégué CGT. Il manque des médecins, des soignants, l’administration doit recruter pour remplacer ceux qui sont testés positifs. » Mais l’administration, justement, ne l’entend pas de cette oreille.

L’administration ne veut rien entendre

Le Professeur Jean Reignier, chef du service réanimation au CHU de Nantes, minimise le problème d’éthique soulevé par les soignants : « Cela reste très rare (…) Cela se fait uniquement pour le personnel qui n’a aucun symptôme, pas de toux, pas de nez qui coule et qui est volontaire. » Mais « cela » n’empêche pas que les porteurs du virus asymptomatiques peuvent être fortement contagieux, selon toutes les études produites et ayant peu à peu aiguisé notre connaissance de cette maladie.

Si le problème concerne le CHU de Nantes, avec pas moins de 192 personnels soignants testés positifs selon un bilan établi en octobre, d’autres centres hospitaliers recourent aux mêmes pratiques. En cause, un avis du Haut Conseil de la santé publique, qui dépend du ministère de la Santé, qui « autorise par dérogation, dans des circonstances exceptionnelles et afin d’assurer la continuité des soins (un impératif), des professionnels positifs au Covid-19 de venir travailler ».

L’avis de l’instance ministérielle et le feu vert d’Olivier Véran

Cet avis, qui fait autorité et rend légale l’obligation pour des soignants porteurs du Coronavirus de se rendre au travail notamment dans les services sensibles où ils sont au contact des patients, date du 23 mai 2020. On peut y lire que « sont concernés par cet avis l’ensemble des professionnels intervenant en établissement de santé et établissement social et médico-social (qu’ils soient ou non soignants) ».

« Un test positif conduit à une éviction de 7 jours après le début des symptômes (reprise du travail au 8ème jour si disparition de la fièvre et amélioration de l’état respiratoire depuis au moins 48 heures) et au respect de mesures barrières renforcées pendant les 7 jours suivants », poursuit le document.

Et il faut lire entre les lignes : si un test s’avère positif, ce n’est qu’à la condition de montrer des symptômes qu’un soignant devra être mis en quarantaine pendant 7 jours. Dans le cas où un professionnel intervenant en établissement de santé, social ou médico-social, serait porteur du virus sans avoir les symptômes de la maladie, il est possible pour la direction d’exiger de lui sa présence sur le lieu de travail, dans un contexte de pénurie de moyens humains (effectifs) et matériels (lits, structures, établissements).

Le Haut Conseil de la santé publique, défini comme commission et instance ministérielle consultative ou délibérative, a ainsi élaboré cet avis et obtenu le feu vert du ministère de la Santé, dirigé par Olivier Véran, pour rendre légales les dispositions préconisées.

Or, « avec ou sans symptômes, une personne contaminée par le Covid-19 peut transmettre l’agent pathogène à 3 personnes en moyenne », rappelle régulièrement l’Organisation mondiale de la Santé.

C’est précisément la pénurie de moyens, combinée à la gestion calamiteuse du système de santé volontairement saboté par les gouvernements libéraux successifs depuis quarante ans, qui aboutit à ce contre-sens dangereux – le mot est faible – tant pour les soignants à bout de souffle que pour les patients des centres hospitaliers en France.

Benoit Delrue, 5 novembre 2020

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