Faillite de la Silicon Valley Bank : derrière la câlinothérapie de Joe Biden, la mise en garde de Bernie Sanders
Ces derniers jours, un séisme traverse le secteur bancaire des États-Unis d’Amérique. En premier point d’orgue, la faillite de la Silicon Valley Bank, fleuron financier de l’industrie de la « tech » (nouvelles technologies) basée dans la partie éponyme de la Californie où la plupart des géants américains du numérique ont établi leurs sièges sociaux.
Joe Biden et Bruno Le Maire à la rescousse
Cette faillite est minimisée, outre-Atlantique, par le président démocrate-libéral Joe Biden qui a assuré, lundi matin heure française, que le système bancaire américain était « solide ». Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie et des Finances du gouvernement d’Emmanuel Macron et d’Élisabeth Borne, jamais avare en prophéties rassurantes qu’elles concernent l’inflation pour la consommation populaire ou la santé des marchés financiers, lui a immédiatement emboîté le pas. Sur Franceinfo lundi 13 mars, M. Le Maire a assuré : « Je ne vois pas de risque de contagion, donc il n’y a pas d’alerte spécifique ».
Reste, malgré ces déclarations confortables de la part de ceux qui se sont refusés à réguler le secteur financier, voire ont activement participé à sa dérégulation, que le risque est fort pour le contribuable d’avoir à payer les pots cassés par les manœuvres des dirigeants capitalistes d’institutions bancaires dont ils ont voulu, dans le contexte pour le moins fluctuant de l’essor des cryptomonnaies, maximiser les profits. Et qui dit prélèvement par l’impôt, comme en 2008 lors du krach boursier mondial à la suite duquel il a fallu « sauver les banques » privées par un accroissement généralisé des dettes souveraines – publiques – des États européens, dit ponction sur la valeur ajoutée produite finalement par celles et ceux qui travaillent, et non par celles et ceux qui les exploitent.
La défense constante des intérêts populaires
À ce sujet, il apparaît intéressant de diffuser la parole des représentants du peuple, français ou étasunien, qui ont toujours combattu la dérégulation de la sphère financière et la pulvérisation des quelques gardes-fous qui freinaient, dans le système capitaliste globalisé, les plus riches dans leur entreprise de spéculation par l’accumulation de capitaux à hauts risques. Bernie Sanders, sénateur américain avec l’intérêt des classes exploitées chevillé au corps, est de ceux-là.
Dimanche 12 mars, depuis Burlington au nord-est du pays, plus grande ville de l’État du Vermont dont il est le représentant au Sénat étasunien, Bernie Sanders – qui fut concurrent d’Hillary Clinton aux primaires démocrates de 2016 puis de Joe Biden à celles de 2020 – vient de publier une déclaration officielle concernant la Silicon Valley Bank. Infoscope en produit ici une traduction.
Déclaration de Bernie Sanders sur la Silicon Valley Bank
BURLINGTON, Vt., 12 mars – Le sénateur Bernie Sanders (I-Vt.) a publié dimanche la déclaration suivante sur la Silicon Valley Bank :
« Soyons clairs. L’échec de la Silicon Valley Bank est le résultat direct d’un projet de loi absurde de déréglementation bancaire de 2018 signé par Donald Trump auquel je me suis fermement opposé. Il y a cinq ans, le directeur républicain du Bureau du budget du Congrès a publié un rapport concluant que cette législation « augmenterait la probabilité qu’une grande entreprise financière dont les actifs se situent entre 100 et 250 milliards de dollars fasse faillite ».
« Malheureusement, c’est précisément ce qui s’est passé. Au cours du débat sur la législation, j’ai dit : « Nos souvenirs sont-ils si courts que nous n’avons rien appris du krach de Wall Street en 2008 ? N’avons-nous rien appris de la catastrophe de l’épargne et des prêts au début des années 1990 ou du vol de Wells Fargo au cours des deux dernières années ou de la malhonnêteté d’Equifax ou de la fraude comptable chez Enron et Arthur Anderson ou de l’échec de Long-Term Capital Management ou les milliards de dollars d’amendes que les institutions financières ont payées pour des activités illégales ou trompeuses ? » Malheureusement, le Congrès républicain et l’administration Trump ont répondu à toutes ces questions par un NON retentissant.
« Ce n’est pas le moment pour les contribuables américains de renflouer Silicon Valley Bank. S’il y a un renflouement de la Silicon Valley Bank, il doit être financé à 100 % par Wall Street et les grandes institutions financières. Nous ne pouvons pas continuer sur la voie de plus de socialisme pour les riches et d’un individualisme forcené pour tous les autres. Ayons le courage de tenir tête à Wall Street, d’abroger la désastreuse loi de déréglementation bancaire de 2018, de démanteler les banques trop grandes pour faire faillite [too big to fail, en anglais, selon l’expression populaire qui s’appliquait notamment au mastodonte Lehman Brothers jusqu’à sa faillite totale à l’automne 2008, NDLR] et de répondre aux besoins des familles de travailleurs, et non aux paris risqués des capitalistes vautours.
De leur solidarité à la nôtre
Les propos de Bernie Sanders sur le « socialisme pour les plus riches » et l’« individualisme forcené pour tous les autres » fait écho à l’analyse que nous a livrée la sociologue française, spécialiste de la grande bourgeoisie capitaliste, Monique Pinçon-Charlot sur la très forte solidarité entre les élites qui pratiquent entre elles « une forme de communisme » pour mieux combattre des classes exploitées en proie à des guerres intestines.
Dans tous les combats majeurs de notre siècle, écologiques, sociaux et sociétaux, qui finiront toujours par opposer l’immense majorité de l’humanité aux quelques-uns qui se gavent de richesses inouïes, il nous faudra faire preuve de cette même solidarité exemplaire entre nous toutes et tous pour que triomphent enfin les intérêts populaires sur les intérêts particuliers d’une caste d’ultra-riches devenue anachronique.