Le Pen et Zemmour représentent un danger de vie ou de mort sociale pour nous, pour vous tous

Comme une musique lancinante, la possibilité pour l’extrême-droite d’arracher la victoire à l’élection présidentielle fascine les observateurs, au premier rang desquels les éditorialistes qui, bien assis autour des plateaux télévisés, dissertent calmement d’une prophétie auto-réalisatrice qu’ils contribuent lourdement à permettre de se réaliser.

Le Pen et Zemmour, c’est l’extrême-droite

Le point commun entre les candidats de l’extrême-droite, en l’occurrence Marine Le Pen et Eric Zemmour, réside dans leur adhésion à un nationalisme chauvin et dans leur défense d’une France fantasmée qui n’a jamais existé, si ce n’est dans les images d’Épinal que laissent parfois dans nos esprits les bribes de nos souvenirs d’enfance.

Une France fille aînée de l’Église, où les rapports sociaux sont apaisés, où la lutte des classes est gommée par une cohésion du peuple et où les bons citoyens respectueux des règles et de la loi peuvent vivre en toute quiétude sans se sentir en danger physique, social, culturel ou civilisationnel : telle est la France fantasmée par les nationalistes, tantôt sincèrement, tantôt par un cynisme conscient qu’il ne s’agit que d’un fantasme sans rapport ni avec notre passé collectif, ni avec notre présent.

Reste que, avec une Le Pen ou un Zemmour au pouvoir, “les règles et la loi” se durciraient, pour ne laisser aucun écart possible vis-à-vis d’une vision étriquée du civisme, de telle sorte que les “bons citoyens respectueux” verraient leur nombre fondre comme neige au soleil, et que non seulement la lutte des classes ne serait pas “gommée“, mais qu’elle s’en verrait renforcée tant la taille du portefeuille compterait pour être considéré, par une police zélée et une justice arbitraire, comme respectables ou, tout au contraire, écrasables.

Bien entendu, l’extrême-droite en tant que concept n’est pas vendeur et il s’agit donc, comme chez tout politicien menteur pathologique, pour le Rassemblement National et Reconquête! de se présenter, soit comme dépassant le clivage gauche-droite, soit comme l’héritier d’une droite républicaine orpheline de ses valeurs et partis historiques. Il s’agit d’une duperie : l’extrême-droite existe dans notre pays comme dans le monde, elle a toujours nié son caractère extrémiste, et une fois au pouvoir a toujours laissé libre cours à sa sauvagerie, à l’application pratique et concrète de ses thèses xénophobes.

Le Pen et Zemmour, c’est la guerre civile

Certains, tentés par l’extrême-droite, affirment qu’il faudrait après tout lui laisser une chance d’exercer le pouvoir – ne serait-ce que pour insuffler un changement à la tête de l’État et pouvoir juger sur pièce. D’autres, tentés par le combat contre l’extrême-droite, estiment que l’arrivée de cette dernière aux plus hautes responsabilités agiraient comme un électrochoc ouvrant la voie à une insurrection populaire.

Ces deux avis confinent à l’imbécilité d’une ignorance crasse. Quiconque s’intéresse, par une approche honnête, à l’histoire de notre pays ou à celle des autres pays composant notre monde sait que l’extrême-droite a déjà été “testée” – et que son exercice du pouvoir a eu des effets dévastateurs immédiats et laissé des séquelles traumatisantes et durables sur les peuples l’ayant subi. Nous vous épargnons la liste des exemples, nous ne pouvons que vous inviter à vérifier les mesures, réformes et transformations imposées par les nationalistes lorsque d’aventure ils se sont emparé de la conduite d’une nation.

Croire ensuite à la possibilité d’une révolte permettant d’approcher des conditions d’une Révolution sociale en faveur des exploités et des opprimés, avec l’extrême-droite au pouvoir, revient à penser que l’amputation d’une jambe peut être chez un sujet non-sportif le facteur déclencheur d’une remise en forme préalable à une victoire éclatante au 110 mètres haies.

La prise de l’État bourgeois par des forces d’extrême-droite serait un point de non-retour dans l’histoire de la France, à partir duquel la plupart des citoyens ne pourraient, au mieux, que rêver de revenir à l’état antérieur qu’est la démocratie libérale. Pour les militants de gauche, pour les travailleurs immigrés, pour les minorités dans leur diversité, pour les engagés des associations de solidarité populaire et des organisations syndicales, pour les journalistes d’investigation, pour les artistes subversifs, l’extrême-droite correspondrait à une mise en danger de vie ou de mort sociale, si ce n’est une mise à mort physique.

Au-delà, ce seraient toutes celles et tous ceux vivant modestement de leur force de travail, quel que soit leur respect des lois actuelles, qui se retrouveraient sous une pression phénoménale, subissant une chape de plomb sociale et culturelle, devant répondre à l’injonction de se mettre au pas d’une nation aux mains d’une bande autrement plus dangereuse que celle exerçant aujourd’hui son pouvoir et son influence, malgré tous les méfaits et destructions actuelles.

La différence fondamentale entre la droite et l’extrême-droite dans leur exercice du pouvoir relève moins des mesures prises à la tête de l’État – et pourtant il y a là davantage qu’une nuance de degrés, il y a une rupture de nature – que ce qu’il se passerait sur le terrain, avec un déchaînement de violences venant de groupuscules fascistes en voie de massification et jouissant d’une impunité totale dans leurs exactions. Autrement dit, il faudrait s’attendre, à l’égard des militants, à l’égard des musulmans, à l’égard de tous ceux qui se trouveraient au mauvais endroit au mauvais moment, à une nouvelle Nuit de Cristal dans les conditions permises par le pourrissement de notre société et les évolutions techniques et technologiques qui nous auraient amenés dans une telle situation.

Le Pen et Zemmour, c’est la guerre

Tout observateur honnête ne peut que remarquer la proximité confondante dans la conception du pouvoir entre Vladimir Poutine et Marine Le Pen ou Eric Zemmour. Bien sûr, leur mandat ne commencerait pas par des manœuvres militaires d’invasion d’un pays voisin – mais qui sait comme il pourrait finir ?

Il est important d’avoir en tête que si on peut apprécier, au sens de saisir, les conditions dans lesquelles l’extrême-droite parvient au pouvoir, on ne peut en revanche imaginer toutes les ruptures politiques, économiques, civilisationnelles induites par son exercice du pouvoir et qui pourraient conduire avec une certitude évidente à une volonté de ne plus lâcher ce pouvoir, quitte à créer en permanence et de toutes pièces des ennemis intérieurs et extérieurs pour détourner l’attention populaire de la critique dudit pouvoir nationaliste.

Toujours le nationalisme a conduit à la guerre et il ne saurait en être autrement en dépit de l’information immédiate et des communications instantanées. Toujours la guerre a conduit au massacre de milliers, quand ce ne sont des millions dans le cas de conflit mondial, de jeunes gens, n’ayant pour certains pas encore atteint leur majorité civique, envoyés au front, alcoolisés et drogués pour suivre le plus aveuglément possible les ordres insensés d’un pouvoir devenu incontrôlable, en plus de sombrer dans la folie.

C’est précisément ce qu’il se passe aujourd’hui en Ukraine, avec des conscrits – autrement dit des soldats n’ayant pas décidé d’embrasser la carrière de militaire mais recrutés de gré ou de force dans la population civile – russes qui, en grande majorité parmi ceux qui tombent au combat ou sont faits prisonniers, proviennent de milieux défavorisés ou de minorités ethniques, comme l’a récemment révélé franceinfo.

Pour conclure, l’extrême-droite est un danger mortel pour l’écrasante majorité de la population du pays qui la porte au pouvoir ; seuls les plus riches, les ultra-riches, pourraient y trouver leur compte. Peut-être pensez-vous en lisant ces lignes qu’elles sont exagérées, que l’alarmisme n’est jamais de bon conseil. Épargnons-nous collectivement l’épreuve de vérifier la véracité de ces hypothèses. Empêchons par tous les moyens à notre disposition l’extrême-droite de conquérir le pouvoir d’un État en voie de pourrissement, ou bien les préoccupations d’aujourd’hui, aussi légitimes et éprouvantes sont-elles, paraîtront bien dérisoires dans une nation en guerre totale.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *