Crise sanitaire & économique : un regard sur le sport amateur

Lors du match de rugby entre l’Écosse et la France, le 22 novembre 2020, la Fédération Française de Rugby (FFR) a décidé de représenter tous les clubs amateurs et loisirs, contraints d’arrêter la pratique, en inscrivant sur le numéro de chaque maillot leur nom. Cette mesure, symbolique, devait s’accompagner d’initiatives plus concrètes, qui sont pour l’heure encore inconnues. Au-delà des formules de multiples fédérations sportives comme du gouvernement qui s’inquiètent tous de l’état du sport amateur, la situation est plus grave qu’on ne le croit, mais elle est antérieure à la crise sanitaire.

Entendons-nous bien sur le terme sport. Un sport est une activité physique basée sur des règles et dont la pratique exige une opposition et nécessite l’inscription dans un club. Cette inscription est une “licence” délivrée par un organisme. Avec tout le respect que l’auteur de ces lignes a pour les pratiques en “-ing” (running, jogging) ou bien pour les salles de musculation comme de fitness, ces pratiques ne sont pas sportives. En dépit de l’apparent succès de ces dernières (plus de 5 millions de personnes sont inscrites en salle de fitness en 2019, selon le Dauphiné), il y a 16 millions de français inscrits dans une discipline reconnue par le Comité Olympique pour quasiment 4 millions de bénévoles (source: “le sport en quelques chiffres”, document édité par le Comité National Olympique et Sportif Français, en 2017). Les Français sont des sportifs et aiment participer à des événements populaires. Le sport amateur est donc le temple des travailleurs et l’un des derniers lieux de socialisation en dehors du travail et/ou de l’École (primaire, secondaire et supérieur inclus). Pour autant, cela fait bien des années qu’on s’inquiète de son état.

Déjà, il s’agit de comprendre qu’il n’y a pas un mais des sports amateurs. En effet, les plus anciens ou ceux qui ont la chance de vivre dans les mairies communistes de banlieue parisienne connaissent les pratiques de l’Union Française des Œuvres Laïques d’Éducation Physique (UFOLEP), qui est un organisme qui regroupe tous types de sports. Sa pratique alternative (on peut citer l’exemple du football mixte), le prix plus qu’abordable de la licence, sa politique favorisant une pratique collective et non-professionnelle ainsi que sa proximité affichée avec le mouvement social ont été victimes d’une lutte féroce des organismes concurrents, à savoir le Comité Olympique ainsi que les Fédérations Sportives, qui regroupent les sports professionnels et amateurs affiliés. Bien que l’UFOLEP soit encore connue pour les compétitions de l’Union Nationale du Sport Scolaire (UNSS) qui lui est proche, elle perd toujours plus de terrain. Ainsi, les Français n’ont guère plus le choix que de s’inscrire auprès d’une Fédération dont le prix de la licence est autrement plus cher et augmente continuellement, le tout pour pallier les frais de fonctionnement des bureaux ou bien pour l’organisation d’événements professionnels extrêmement onéreux (Jeux Olympiques en tête).

On peut être fier de l’investissement de millions de bénévoles qui ne comptent pas leurs heures, à des milliers d’années-lumière d’un sport professionnel qui s’extrait toujours plus des impératifs de leurs confrères. Avoir donc son club inscrit sur le maillot du XV de France peut prêter à sourire quand on voit que la plupart des clubs vivent en fait des aides des collectivités territoriales, premières victimes de l’austérité et qui rabotent souvent leur budget sur le sport. Dans le meilleur des cas.

Dans le pire, en particulier lorsque les clubs refusent d’être “compétitifs” (c’est à dire qui participent aux championnats) pour être seulement “loisirs”, il arrive que les villes voient d’un mauvais œil cette pratique qui ne leur donne pas une visibilité et donc ne financent rien. C’est pourquoi ces équipes surtaxent leur licence afin de survivre, provoquant une sélection sociale sur le critère de l’argent.

La crise sanitaire est d’autant plus difficile à vivre pour les sportifs, qui voient leurs homologues professionnels continuer à jouer dans des stades vides, alors qu’ils ne peuvent pas eux-mêmes s’entraîner ni se réunir. Pour l’heure, aucune indication n’est donnée quant à un quelconque remboursement des licences alors que l’inquiétude pèse sur un nouvel arrêt de la saison qui serait très mal vécu. Peut-être qu’un geste financier vis-à-vis des licenciés, en remboursant ce qu’ils ont avancé, serait une mesure concrète alors que la précarité n’a jamais été aussi forte.

Pour en savoir plus, le site internet de l’UFOLEP : https://www.ufolep.org/.

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