Effondrement

Les mesures prises par les pouvoirs publics, Emmanuel Macron en tête, suite à l’incendie de Notre-Dame de Paris, le 15 avril dernier, n’ont pas fini de provoquer des ravages.

La contamination au plomb a occupé une partie de l’actualité ces dernières semaines : 400 tonnes de plomb contenues dans la charpente de la flèche, la toiture, les peintures, les vitraux de l’édifice ont fondu ou sont parties en fumée, se répandant sous forme de particules dans les rues et bâtiments alentours. Le gouvernement n’avait pas jugé utile, des semaines durant, de se préoccuper de cette cause sanitaire, malgré l’alerte de plusieurs associations dès le lendemain du drame, notamment l’Association des familles victimes du saturnisme, maladie grave correspondant à une intoxication aiguë ou chronique au plomb. En ce début du mois d’août, en tout et pour tout, seuls 160 dépistages sanguins ont été réalisés – sur des enfants – tandis que des dizaines de milliers d’habitants vivent dans le seul arrondissement de la cathédrale, dont le plomb a sans aucun doute dépassé les frontières.

Le chef de l’État est surtout coupable d’avoir promis, dès le 16 avril, lendemain de l’incendie, une restauration expéditive. « Je veux que la reconstruction soit achevée d’ici cinq années », avait-il alors déclaré, cette date-butoir correspondant à l’accueil des Jeux Olympiques 2024 par la capitale française. Notre-Dame de Paris a été construire en près de deux siècles, entre 1163 et 1345, mais, ravagée par les flammes, elle sera reconstruite en 36 fois moins de temps, selon le bon vouloir d’Emmanuel Macron ! Les responsables de la restauration, désignés par le pouvoir politique, ont donc annoncé au printemps que le déblaiement des décombres et la sécurisation du site seraient achevés avant la fin du mois d’août. Aujourd’hui, on en est très loin : les centaines de tonnes de poutres, en partie consumées, sont toujours en place, et leur déplacement doit être effectué avec la plus grande prudence, car le risque d’un nouvel effondrement s’avère très élevé. Quant à la sécurisation du site, elle ne sera pas achevée avant, au mieux, début 2020.

L’ordre d’une reconstruction rapide donné par Macron a surtout mis en danger les ouvriers chargés d’intervenir dans et aux abords de la cathédrale incendiée. Durant des mois, les tenues de protection n’étaient pas suffisamment portées, le nettoyage des vêtements et de la peau fait à la va-vite et les sas de décontamination très peu utilisés. Sur le chantier, les chefs répercutaient les consignes de précipitation venues du plus haut niveau. Il a fallu un rapport de l’Inspection du travail, pointant le manque de mesures de protection des ouvriers face au plomb, pour que le préfet décide d’arrêter séance tenante toute activité du chantier, le 25 juillet. La préfecture a ordonné la mise en place de nouveaux protocoles sanitaires, et le respect de ceux déjà existants, pour la reprise du travail, qui n’aura pas lieu avant lundi 12 août prochain.

Si la reconstruction de Notre-Dame de Paris ne devrait pas connaître de pépin financier, étant donnée la solidarité de nombreux contributeurs, elle ne saurait pour autant dissimuler le très faible investissement de l’État dans l’entretien du patrimoine public et de ses nombreux monuments. En 2018, moins de 40 millions d’euros ont été affectés, par le gouvernement via le ministère de la Culture, à la restauration et à l’entretien des 87 cathédrales qui appartiennent à l’État. Celles de Beauvais, Bourges et Reims sont « en mauvais état », celles de Clermont-Ferrand et Luçon sont en état de « péril partiel », selon les pouvoirs publics eux-mêmes. Il semble peu probable que ce budget augmente, Emmanuel Macron et ses ministres étant attachés, comme tout bon ultra-libéral, au dogme de la baisse des dépenses publiques.

Le Président de la République, après avoir mis en danger la vie des ouvriers sur le chantier de Notre-Dame, peut toujours courir pour inaugurer la reconstruction de la cathédrale parisienne en 2024. Son objectif s’est effondré.

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