Unir et vaincre: de la lutte à la guerre de classe (1/3)

La bourgeoisie et la tentation du fascisme

 

En tant que mouvement réel des choses, le fascisme se veut comme l’expression d’une tendance générale de la bourgeoisie, celle où elle admet l’échec de l’établissement du libre marché comme le meilleur moyen de production. 

L’aveuglement idéaliste de la classe dominante à continuer à vivre selon des codes et des normes dépassés marque la séparation définitive entre le Capital et le Travail. Les riches familles vivent dans un autre monde bien que nous soyons tous sur la même planète.

 

L’effacement du marqueur de classe

 

La prise de pouvoir d’Emmanuel Macron démontre la volonté de la bourgeoisie à effacer tout marqueur de classe en faisant disparaître des débats politiques le clivage gauche/droite, excluant de fait la classe laborieuse en la faisant passer pour une masse de rustres réactionnaires. Cette dynamique est propice au fascisme en cela qu’elle exclut l’identification des intérêts propres à chacune des classes sociales, au profit d’une raison générale présentée comme supérieure, qui exige de chacun un positionnement binaire en fonction de celle-ci. L’issue de chaque débat est un motif bien pratique pour accuser toute voix contradictoire d’être celle d’un ennemi intérieur.

Pour autant, force est de constater que le Capital se prépare lentement à céder le pouvoir à des laquais dont la nature violente ne leur échappe pas.  

Cette stratégie a déjà fait ses preuves aux États-Unis d’Amérique et est un précédent appelant à faire jurisprudence en Europe, qui n’est jamais la dernière à imiter le débat politique, médiatique et culturel outre-Atlantique.

 

La stratégie de la surenchère nationaliste

 

Qu’on ne s’y trompe pas, bien que le gouvernement libéral privilégie la surenchère nationaliste, on finit toujours par préférer un authentique fascisme à une droite nationaliste insuffisament réactionnaire. 

Cela est très clair au regard de la stratégie marketing de M. Bolloré, propriétaire du groupe médiatique Canal, qui fait tout pour obtenir le remake de la dernière élection présidentielle. Mme Le Pen est systématiquement présentée comme la seule alternative à M. Macron, et M. Macron est systématiquement présenté comme la seule alternative à Mme Le Pen. L’alternative portée par le mouvement social n’a pas d’existence dans ce monde.

Quoi qu’en pensent les éditocrates de CNews, le RN n’est en rien le premier parti ouvrier de France. Bien que l’électorat du parti fondé par la famille Le Pen soit celui d’une catégorie de la population exclue du processus de production, les cadres dirigeants sont, comme dans beaucoup de partis réactionnaires, des personnes favorisées par la société, qui n’ont donc pas intérêt au changement de l’ordre établi.

Le premier parti ouvrier de France reste l’abstention et cette résignation populaire favorise un climat de tensions sociales, qui semble bon pour les affaires à en juger par les chroniqueurs qu’on nous sert sur les plateaux télévisés.

 

La tentation de faire régner l’ordre par la terreur

 

De la même manière, la gestion gouvernementale de la pandémie symbolise la tentation de la bourgeoisie à faire régner l’ordre par la terreur ou tout du moins à banaliser ces mots d’ordres dans l’esprit des électeurs. Par une phraséologie guerrière, elle fabrique le consentement pour favoriser l’inaction générale.

À l’aide de cette stratégie, l’objectif est clair : au mieux, M. Macron sera de nouveau élu et nous aurons le droit à un nouveau quinquennat de régression sociale. Au pire, ce sera au tour de Mme Le Pen et nul doute qu’elle saura se montrer docile pour obtenir la sympathie du patronat. 

 

La tactique du pompier pyromane (1)

 

La tactique du pompier pyromane représente un danger réel dans la mesure où aucun ne peut s’assurer de la mobilisation électorale des travailleurs. 

Des années voire des décennies ont provoqué le désenchantement. Combien de fois avons-nous entendu que si le RN se trouvait au pouvoir, rien ne changerait ?

Les plus audacieux diraient même qu’une thérapie par le choc ne ferait de mal à personne. « Peut-être est-ce grâce à ça qu’on aura l’insurrection tant attendue ». Voilà une prédiction des plus singulières mais qui a bonne presse dans les discussions auprès des travailleurs. 

En être résigné au point d’attendre un événement apocalyptique ne peut être qu’une aubaine pour la bourgeoisie. Si on suit cette logique nihiliste, on remet toujours à plus tard l’organisation du mouvement social, au moment même où le pouvoir appartiendrait aux nationalistes, les sources de la révolte risquent déjà d’être taries.

Dans un même temps, la stratégie de dédiabolisation fasciste, bien appuyée par les grands groupes médiatiques, s’assure que son renforcement est permis par la passivité des travailleurs, à tel point qu’ils sont, aujourd’hui, considérés membres de la démocratie libérale comme d’autres partis et d’autres mouvements. Ainsi, cette réflexion ne pourra jamais être une réalité : l’insurrection ne pourrait jamais être considérée comme juste et légitime si les groupuscules factieux sont protégés par l’aura du Rassemblement National alors que le mouvement social n’est pas prêt à lutter.

 

La tactique du pompier pyromane (2)

 

La tactique du pompier pyromane correspond certainement à l’inquiétude lancinante de la bourgeoisie quant au soulèvement populaire. Il faut se méfier d’un peuple à la colère sourde, elle peut exploser à n’importe quel moment. 

La crise des gilets jaunes a rappelé comme une marque au fer rouge que les travailleurs ne peuvent tout simplement plus supporter une telle exploitation. 

L’empressement du patronat à lâcher quelques miettes au plus fort de la lutte étonne autant que le déploiement d’un arsenal policier quasiment militaire, utilisé avec une violence sourde et permise par un mépris aveugle des administrations.

 

Imposer son propre agenda

 

Cela peut s’expliquer aussi par le fait que le mouvement social n’a pas réagi à l’agenda politique mais a su, pour la première fois depuis très longtemps, imposer le sien dans le débat public. 

C’était il y a deux ans, une éternité et pourtant cette dernière expérience du mouvement social – dont on peut critiquer la posture “anti organisation”, amalgamant d’ailleurs les outils du mouvement social sans distinguer leur rôle respectif – reste sans équivoque sur les leçons. 

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